INFIPP : le projet coopératif pour fédérer les salariés

« L’histoire coopérative de l’INFIPP commence en 2000″. Soit un deuxième chapitre initié par la volonté affirmée de huit personnes, bien décidées à faire perdurer l’Institut National pour la Formation des Infirmiers et du Personnel travaillant en Psychiatrie. Sous statut associatif depuis 1975, cette structure s’est fait un nom dans le champ de la santé mentale grâce à sa vision militante du lien aux malades et de ses conditions d’accueil. Une vision qui lui a permis de rapidement accroître son volume d’activité, mais d’oublier par la même occasion de structurer suffisamment ses ressources économiques et son modèle de gestion. Les difficultés s’accumulent au cours des années 90 et l’association dépose le bilan en 2000. Convaincus que l’INFIPP a un rôle à jouer dans le secteur, huit salariés et intervenants ont refusé de baisser les bras, et ont déposé un dossier de reprise sous forme de Scop. Parmi eux, Jean-Paul Baricault, actuel Président de l’entreprise :

« C’était coopératif sinon rien. Plus pour la teneur du projet que pour autre chose : l’esprit de l’association ayant un fort aspect militant sur le champ de l’humain et de la santé mentale, on ne se voyait pas monter une boîte classique qui ait juste un objectif économique. On voulait que derrière, il y ait quelque chose qui ressemble à un projet, et c’est le projet coopératif qui a fédéré les huit personnes ».

Dès le départ, l’Union Régionale des Scop s’est mobilisée pour accompagner le collectif, et contribuer à construire des fondations solides pour que la future Scop puisse redémarrer sereinement :

« On sait ce qu’on leur doit, et c’est clair qu’on n’y serait pas arrivé tout seul. On venait de tous milieux, sauf du milieu entrepreneurial, donc l’accompagnement était bienvenu ».

Depuis sa renaissance coopérative, l’INFIPP a fait du chemin, a su se donner les moyens de grandir et d’élargir ses champs d’intervention :

« On a revu complètement à la fois les produits, les logiques économiques et la segmentation du marché. On a bien sûr continué ce qu’on savait faire, ce qui touchait à la psychiatrie et à la santé mentale, et on a développé également le sanitaire. On a vite été repéré en tant que spécialiste de la relation, parce qu’on est resté sur des gammes de produits qui parlent au final de la même chose : de l’humain, en souffrance ou en bonne santé ».

Les résultats ne tardent pas à être spectaculaires, et dessinent un bilan décennal plus qu’exemplaire :

« En termes quantitatifs, on peut dire que la Scop a triplé en dix ans : dix salariés permanents lors de la reprise, trente aujourd’hui, 200 formateurs vacataires à la reprise, 600 aujourd’hui, 2 millions de CA, 6 millions aujourd’hui. On est sur un schéma de croissance cohérent ».

Ces résultats sont surtout ceux d’une entreprise qui a su faire de son statut coopératif un atout supplémentaire et une base consistante pour son développement :

« On évolue dans une conjoncture qui n’est pas tendre en ce moment, et il faut se cramponner aux branches quand même. Mais le modèle coopératif nous permet d’être assez sereins dans l’environnement actuel, ça rassure les salariés, et il y a cette dimension de pérennité qui est intéressante. Même si on partage les inquiétudes liées au contexte, on a un statut et une production qui nous mettent un peu plus à l’abri des séismes. Et c’est une chance ».

Jean-Paul Baricault n’oublie pourtant pas que la vie coopérative de l’entreprise ne se construit pas toute seule, et qu’il est nécessaire de mettre en œuvre un travail spécifique au long cours pour que le modèle soit pleinement vécu :

« Une Scop, ça se construit tous les jours. La notion de coopération, ça doit se ressentir au quotidien, et pas seulement lors des Assemblées Générales et séminaires. et c’est une chose de parler des valeurs coopératives, c’en est une autre de les appliquer dans les faits, par des actes signifiants. Le projet d’entreprise a été long à caler… Mais bon, en termes de management, une Scop, c’est surtout du bonheur. Chacun sait que si l’année est bonne, personne ne sera oublié. Tout le monde en a conscience, et on n’a pas de turn-over à l’INFIPP ! »

C’est là le signe d’une entreprise qui avance avec le sentiment du devoir accompli, tout en ayant conscience des opportunités futures.