La Scop Argos, soudée par ses salariés

Le cabinet de consultants grenoblois est passé en Scop en 2008. Cinq ans plus tard, retour sur cette manière de matérialiser la philosophie participative de cette société, et de préparer en douceur le passage de relais de la direction.

Argos a 21 ans quand elle passe du statut de Sarl à celui de Scop, société coopérative et participative, en 2008. Une suite logique dans la maturation de cette agence spécialisée dans les politiques urbaines et sociales, le développement économique, l’emploi et le développement durable des territoires.

Les salariés, la plupart consultants, y ont toujours été associés de manière étroite aux réflexions stratégiques. « Il a toujours été important que chacun intègre les objectifs et les priorités de l’entreprise », explique Michel Basset, cofondateur et gérant d’Argos, basé à Grenoble. N’avoir que deux salariés-associés (sur près de 15 % du capital) à sa Sarl n’était pas assez à son goût. « J’avais 7O % du capital ; c’était un frein à l’entrée d’autres associés qui ne voyaient pas d’intérêt à avoir si peu de parts », se souvient-il.

L’option de la coopérative se présente alors. « J’avais cinquante ans, c’était l’occasion d’imaginer une transition à terme. Mon idée est de sortir en douceur même si je garde toujours un pied dedans », confie le gérant. La possibilité de créer un groupement d’indépendants est évoquée, mais paraît moins rassurante aux yeux de l’équipe.

« LE PETIT PLUS »

Bâtir le nouveau modèle a demandé de franchir quelques caps. Face à la décision de muter en Scop, le « ticket d’entrée » – un apport personnel de 2000 à 3000 euros – refroidit quelques collaborateurs. Leur crainte : ne pas récupérer à terme la totalité de leur mise. « La résistance venait de ceux qui ne se sentaient pas entrepreneurs », se souvient le gérant. Trois collaborateurs sont venus de l’extérieur, huit salariés sont devenus collaborateurs, les cinq autres ont opté pour le simple salariat. Laissant deux vitesses de responsabilité : « Il a fallu un temps pour articuler les instances de gouvernement et les temps de réflexion entre salariés car nous voulions conserver une dimension collective », se souvient Michel Basset. La solution trouvée ? Réserver certains thèmes aux associés, comme les embauches et les grandes orientations stratégiques.

Mais au fond, qu’est-ce qui a changé chez Argos ? « Nous avions laissé sur le chemin un collaborateur, ce qui a généré un peu d’instabilité. Mais finalement, passer en Scop a créé une sorte d’émulation. Quand nous avons traversé une situation économique tendue, en 2009, chacun a dû laisser un mois de salaire. Cela a permis de maintenir une cohésion », raconte Michel Basset. Et face aux collectivités, ses clients ? « C’est le petit plus », admet-il. L’activité est aujourd’hui équilibrée (700 000 euros pour 2011-2012).

Aucune embauche n’est prévue. « Depuis 2000, nous sommes plus prudent », explique le gérant. Le projet ? Rebâtir une stratégie commerciale pour réorganiser les compétences en interne. Et préparer le terrain pour la nouvelle gérance, élue dans deux ans. « Celui qui doit reprendre fait partie d’Argos depuis quatorze ans », confie Michel Basset, assuré d’avoir prévu ce qui convenait au futur du cabinet.

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Adeline Charvet
Article réalisé en partenariat avec la revue Acteurs de l’économie